Lettre de Marie-Thérèse Lanoa à Nicolas Dariel
Lundi soir Revenons d’une journée chez Claude et toute la friture enfantine de chez Bruno, le long week-end de Pentecôte terminé – après avoir sans succès cherché une photo de Fête-Dieu à Crosne « où Nicolas et Agnès sont à croquer », que je destinais à Hillary – je la retrouverai en ne la cherchant plus… Invités à un mariage, les enfants de
Bruno – peu rassurés par la compagnie – se sont levés, ont pris la clé, enfermé la jeune fille qui les gardait et sont partis à l’aventure pour retrouver la noce; des garçons d’hôtels les rencontrant perdus, les y ont conduits ; ils se sont dirigés vers les personnes importantes; Olivia a dit de sa voix aussi microscopique que sa personne « Voilà la clé ! ».
J’ai heureusement de bons livres, et spécialement le dernier Maritain «Le paysan de la Garonne » : un vieux laïque s’interroge sur les temps présents, il s’occupe surtout des répercussions du Concile sur de zélés imbéciles, laïques et même clercs, brouillons, actifs et dangereux. Le ton est naturellement celui du paysan du Danube et j’ai passé près de deux mois à lire en le ce long livre remarquable et d’un interêt varié. Avez-vous lu les Grandes Amitiés ? Voilà Follette qui a été si rebelle à la lecture qui de son côté, je ne sais par qui, a été aiguillée sur ce même « paysan » (retiré chez les petits frères de Foucault) qu’elle dévore.
Jeudi matin, au réveil Je pense terminer avant de me lever avec la couleur qui me tombe sous la main, avant de partir pour mon tour de parc quotidien – trois ou quatre km selon les jours, nécessaire à mon dos – fait à quatre km heure ; Papaf dit que c’est la vitesse du troupier. La Seine – le parc – mon parc – où je suis seule le matin et dont la beauté se renouvelle selon le temps.
Maritain a écrit un « carnet de notes » à la mémoire des petits frères de pauvres de Toulouse, je l’aimais mais c’est un gros livre, de même que « Le paysan » qui est d’une autre plume : après avoir annoncé qu’il était résolu à mettre les pieds dans le plat… et il s’en donne… C’est très intéressant et il arrive à une telle clarté dans les développements philosophiques qu’ils sont compréhensibles pour les personnes sous-développées en cette matière. J’écris tellement de notes là-dessus que mes quatre stylos sont vides, j’ai un petit train de fièvre… un traitement de choc pour un an… C’est une épreuve que je prendrai pour un défi puisque c’est ce qui provoque l’action chez les humains, dit on. Je reprends depuis trois jours mes promenades dans le parc – 3 km en 3/4 d’heure dit Paf – n’ayant heureusement que les vertèbres désorganisées par ma chute, mes jambes volent littéralement, c’est déjà bien…
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Je regarde cette page remplie d’une belle écriture, volontaire – musclée – inventive, irrégulière, qui fait souffrir le stylo, parcours de VTT avec des virages dans les lignes droites, des coups de freins inattendus déjà dans l’écriture: elle dessine, elle peint. Elle en remet une couche et comme le papier est précieux, elle le remplit, le tisse, tourne autour de la page comme un ourlet, pour un peu en continuant ainsi elle en ferait un tricot. N.Dariel